LA PREMIÈRE RECETTE CRÉÉE À L’AIDE DE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE OU COMMENT DÉCUPLER LA CRÉATIVITÉ CULINAIRE

En collaboration avec le chef Romain Fornell, du restaurant Caelis 1*, à Barcelone, lors du congrès Madrid Fusión.

Infatigable innovateur, François Chartier est le premier avec l’équipe de SONY AI Gastronomy, à mettre l’intelligence artificielle (I.A.) au service de la gastronomie. Cette approche lui a été inspirée par sa collaboration avec le comité de recherche sur l’I.A. mis sur pied par l’équipe de scientifiques de SONY AI AND GASTRONOMY, à Tokyo, où il siège depuis janvier 2019 sur le comité de recherche en tant que consultant principal. Il a présenté sa démarche avec les chercheurs de SONY AI, le 14 janvier 2020, devant plus de 1000 grands chefs des quatre coins du monde, à Madrid Fusión, salon culinaire de référence pour l’innovation gastronomique.

François Chartier a débuté sa présentation en expliquant combien SONY avait, depuis sa fondation, permis à de nombreux artistes de laisser libre cours à leur créativité et à leur imagination, qu’ils soient musiciens, artistes visuels, producteurs de films, créateurs de jeux vidéo en devenant leur agent et en s’occupant de leur promotion. Et maintenant, voilà que l’entreprise décidait de placer son savoir technologique au service de la gastronomie, avec l’aide de François Chartier, en créant en 2019 la division SONY AI AND GASTRONOMY. Michael Spranger, de SONY AI, a aussi mis en contexte le travail colossal entrepris avec François Chartier sur ce projet. « Pendant toute une année, nous avons pris les outils d’I.A. que nous utilisons pour la musique et nous les avons combinés avec la connaissance savante qu’a François de la gastronomie, afin d’en arriver à créer un système qui faciliterait la création de recettes, tant pour les chefs professionnels que pour les cuisiniers amateurs. »

Nourrir l’I.A. de connaissances humaines

Mais il fallait d’abord fournir des masses d’information au logiciel d’I.A. pour y parvenir. « Les chefs, lorsqu’ils créent une recette, ont tout un bagage de connaissances à des niveaux multiples qui leur permettent de faire rapidement de nombreuses associations et de traiter d’énormes doses d’informations en un temps record » de préciser Chartier lors de la conférence. Ce bagage comprend des choses aussi différentes que le contexte culturel, les connaissances techniques, la perception – comme la texture, le goût, la manière de dresser une assiette –, la saisonnalité des ingrédients, les composés moléculaires, la température, la couleur, la géolocalisation aussi, qui permet d’identifier le plus possible de cuisines du monde. Pour être efficace et pouvoir favoriser la créativité, l’I.A. doit donc d’abord être nourrie d’une énorme quantité d’informations de tous ordres. C’est d’abord à cette gigantesque collecte de données que SONY AI et François Chartier se sont attelés. « Le but, par cette intégration d’une foule d’éléments, c’est de faciliter votre créativité », d’expliquer le créateur d’harmonies à l’audience de professionnels réunis à Madrid Fusión.

Pour l’équipe derrière l’aventure, il s’agit d’un travail de longue haleine, un « work in progress ». Mais l’assistance, composée de cuisiniers, de sommeliers et de journalistes de la presse spécialisée, avait bien hâte de voir l’I.A. au service de la créativité culinaire en action… La démonstration orchestrée par François Chartier ne s’est pas fait attendre.

L’humain au cœur du projet

Durant la démonstration, il s’agissait pour François Chartier d’établir un dialogue avec l’intelligence artificielle (I.A.) en montrant comment il pouvait interagir avec la machine afin de développer une idée de recette tout à fait originale. Car, insiste-t-il en début de la performance, ne vous y trompez pas : « sans le créateur pour guider l’intelligence artificielle, la recette n’existe pas. »

L’idée initiale pour notre infatigable chercheur était donc des plus simple : faire comme s’il était au Japon et créer un plat à base de sauce de soja. Mais, au fil du dialogue établi avec l’I.A., le concept a plutôt évolué (comme c’est souvent le cas avec les chefs lors de séances de création) vers l’utilisation du chocolat Ruby de Cacao Barry, un nouveau produit d’exception. Puisque François Chartier ne souhaitait pas utiliser le chocolat dans un dessert et qu’il voulait aussi obtenir une texture croustillante pour sa création, l’I.A. lui a proposé des pistes de solution inédites : au lieu de travailler avec sa proposition de départ (sirop d’érable, poivre de Sichuan, cari), une autre suggestion est venue : travailler avec des asperges rôties, du café et des piments de chili rôtis. Mais Chartier tenait à lancer un défi supplémentaire à l’I.A. : il voulait que son plat ait une texture différente, craquante. L’I.A. s’est adaptée rapidement et lui a alors proposé une troisième option : du chou-fleur déshydraté, sous forme de couscous, puis rôti, ainsi que de l’algue nori et de l’oursin pour accompagner le chocolat Ruby ; de nouveaux ingrédients pour un plat d’un genre nouveau ! On le voit ici, le créateur d’harmonies était en constante interaction avec la machine qui, en retour, lui offrait des sentiers gustatifs et culturels distincts pour son plat. Un dialogue constructif qui aura permis la création d’une recette unique.

Local, saisonnier, écolo

Mais le travail n’allait pas s’arrêter là. Puisque le fait d’utiliser des ingrédients locaux constitue une démarche essentielle pour les cuisiniers du monde entier, car elle permet à la fois de respecter le travail des artisans d’une région donnée, la saisonnalité des produits et l’environnement par l’utilisation de circuits courts d’approvisionnement, l’I.A. en a tenu compte. Pour cette conférence qui se déroulait à Madrid, elle a donc proposé de remplacer le camembert français initialement proposé par le système I. A. pour la recette par le fromage catalan Tou del Tillers, et le poivre de Sichuan par du pimentón, du poivron doux espagnol séché et mis en poudre.

Place à l’inspiration du chef

François Chartier a ensuite demandé à son ami Romain Fornell, du restaurant étoilé Caelis à Barcelone, de créer un tapas qui marierait les ingrédients choisis en équipe avec l’I.A., tout en évitant de lui imposer des directives susceptibles de brimer sa créativité.
Le résultat fut spectaculaire et tout à fait unique : une tuile de fromage Tou Del Tillers avec crumble de couscous de chou-fleur rôti, chocolat Ruby Cacao Barry, purée à l’algue nori et une autre à l’oursin parfumée au pimentón.

A-t-on alors créé un dessert à l’oursin ou un tapas apéritif au chocolat ? Peu importe, puisque l’intelligence artificielle, jumelée aux idées de François Chartier, puis à la créativité du chef Romain Fornell, a permis d’ouvrir une piste de recherche culinaire prometteuse par la création de ce plat débordant de saveurs et de textures nouvelles parfaitement associées, grâce à un dialogue constant entre l’homme et la machine. Sans compter que l’une des directives que Chartier avait transmises au système I.A. était que les aliments soient aussi sur la piste aromatique des sakés de type junmai. L’harmonie parfaite fut réalisée sur scène, avec le tout nouveau Saké Tanaka 1789 X Chartier, Blend 001, Junmai Nama-zume 2018, né de la nouvelle collaboration de Chartier avec la brasserie ancestrale Tanaka 1789 – qui sera lancé mondialement en 2020.

François Chartier a terminé sa présentation avec une intéressante question pour son auditoire: « L’intelligence artificielle sera-t-elle le prochain ingrédient secret en gastronomie ? ».

Liens : Partenaire

ELBULLI

En juin 2008, François Chartier était invité par les deux associés du mythique restaurant catalan elBulli, Ferran Adrià et le regretté Juli Soler, à partager sa science aromatique d’harmonies moléculaires au cours d’une master class privée. Orchestrée pour l’ensemble de l’équipe de cuisine et de salle de ce restaurant élu Meilleur restaurant au monde à cinq reprises, celle-ci marquera le début d’une collaboration intime, au cœur de ce haut-lieu de la créativité mondiale gastronomique.

DOS PALILLOS

À l’occasion des 10 ans du restaurant barcelonais étoilé Michelin Dos Palillos, Albert Raurich a décidé de créer une série de 12 événements gastronomiques spéciaux et d’inviter chaque mois ses amis à préparer un repas avec lui dans son établissement, dont François Chartier. Albert Raurich a donc chargé Chartier de l’élaboration d’un menu inspiré de sa science d’harmonies moléculaires, afin de célébrer par le fait même les 30 ans de carrière aromatique du « Créateur d’harmonies » québécois.

TANAKA 1789 X CHARTIER

François Chartier nous présente un premier saké créé pour Tanaka 1789 à partir d’un assemblage. La notion de blend est innovatrice, pour ne pas dire carrément audacieuse dans l’univers très codifié de cette vénérable boisson; une fois de plus, le créateur d’harmonies innove!