Par François Chartier « Créateur d’harmonies »
Pour capter l’essence même du sauvignon blanc, il faut se diriger vers la Loire, plus précisément dans ses terroirs de prédilection, soit les zones des appellations Sancerre, Pouilly-Fumé et Menetou-Salon.
Capable de rivaliser régulièrement avec les meilleurs de la Loire, les blancs de Bordeaux ne sont pas en reste, du moins ceux qui sont élaborés avec du sauvignon blanc à 100 %; car, nombreux sont les assemblages élaborés avec le sémillon blanc (plus gras) et la muscadelle, si parfumée!
Et à quoi ressemble cette quintessence du blanc fumé, nom qu’on lui donne à Pouilly?
Lorsque les conditions sont réunies, ce cépage engendre des blancs secs pouvant exhaler des notes anisées saisissantes de menthe fraîche et de basilic (provenant de molécules à goût anisé) ainsi que des tonalités de buis, de fruit de la passion et de pamplemousse rose (issues de molécules de thiols). Cela donne une bouche à la fois croquante et vivifiante, soyeuse et fraîche, ample et texturée, mais avec vitalité et verticalité, en plus d’une minéralité qui peut être quasi cosmique, du moins chez les meilleurs crus de ce type.
Cela donne des vins sapides à souhait pour l’heure de l’apéritif, tout comme de grands maestros à table, grâce à une digestibilité qui donne à boire.
Il faut les accompagner de mets aériens qui peuvent être dominés par une fraîche acidité, de même que par des parfums d’herbes aromatiques.
À cet égard sont à privilégier l’aneth, l’anis étoilé (badiane chinoise), le basilic, le carvi, le cerfeuil, le fenouil, la menthe et le persil, sans oublier le céleri, la carotte et le panais.
Oubliez les viandes et les poissons très gras en sauce onctueuse… Optez plutôt pour les coquillages et les crustacés iodés ainsi que pour les poissons fins.
Cela différencie légèrement ces vins français des sauvignons néo-zélandais qui peuvent soutenir, dans certains cas, des mets légèrement plus riches et des sauces à base de fruits.
Justement, depuis l’implantation du sauvignon blanc dans les pays du Nouveau Monde, les effluves des vins qui en sont issus se sont grandement extravertis et leur texture en bouche s’est beaucoup satinée.
Un sauvignon néo-zélandais peut se montrer exotique au possible, s’exprimant par des notes de kiwi, d’ananas et de lime, et démontrer une bouche plus ample et croquante, plus juteuse et rafraîchissante qui est à la fois ronde et savoureuse, presque sucrée (sans sucre). D’un charme immédiat, quoi!
Ce qui n’exclut pas, chez les meilleurs, de retrouver l’esprit et la grande verticalité qui fait la marque de commerce de ce cépage aromatique.
Bordeaux et Loire
Pour un premier exemple français, servez un expressif Premières-Côtes-de-Blaye à l’apéritif, avec de classiques canapés de bouchées d’escargot au beurre de persil ou avec des moules marinière « à ma façon », rehaussées de beaucoup de persil frais. Ce vin est presque mordant, pour ne pas dire croquant, tant son acidité fouette les papilles et leur procure une sapidité digeste et rafraîchissante. Menthe fraîche, persil et citron donnent le ton.
Pour plonger au coeur de la zone de prédilection du sauvignon blanc, optez pour un vin de Menetou-Salon, appellation voisine de Sancerre. Ces vins sont purs et raffinés, anisés à souhait, à la bouche droite, vivifiante et très expressive qui laisse deviner des notes subtiles et aériennes de menthe, de pamplemousse, de buis et de fruit de la passion.
Plus soutenu que le précédent bordeaux, il sera en mesure de garder le cap avec des mets légèrement plus texturés, tels les canapés au saumon fumé à l’aneth, les mini brochettes de crevettes au basilic ainsi que le filet de truite poêlé accompagné d’une purée de céleri-rave.
Enfin, pour vous rapprocher de la découverte du Saint Graal, servez l’une des grandes pointures de Sancerre, plus longiligne, plus « minéralisante » et plus dense que les voisins de Pouilly-Fumé ou de Menetou-Salon.
N’hésitez pas à présenter à vos invités une rosace de saumon mariné sur salade de fenouil cru avec vinaigrette au pamplemousse rose ainsi que des crêpes fines aux asperges et au saumon fumé.
Nouvelle-Zélande
Du côté des sauvignons néo-zélandais, faites vos gammes avec un sauvignon exotique au possible et expressif qui exhale des notes de bourgeon de cassis, de kiwi, d’ananas et de lime, à la bouche ample et croquante, juteuse, rafraîchissante, mais aussi ronde et presque sucrée (sans sucre). Des qualités que le sauvignon blanc de Marlborough démontre avec panache. Il fera fureur à l’apéritif, tant avec des avocats farcis aux crevettes et aux asperges qu’avec des fusilli au saumon parfumés au cerfeuil.
Et si vous optez pour une version qui a séjourné en barriques de chêne, plus nourrie, il vous faudra alors plus de chair, comme on en trouve dans des pétoncles poêlés baignés d’une sauce à la crème de céleri et accompagnés d’anguille fumée ou avec des brochettes de poulet et de crevettes accompagnées d’une sauce moutarde et miel.
Ces deux mets sont plus pénétrants et ils iront à merveille avec son profil plus nourri et ses parfums moins exotiques qui jouent davantage dans la sphère des fruits à chair blanche et des fruits secs grillés; ils seront aussi en accord parfait avec sa belle matière, son boisé intégré, ses saveurs expansives et son acidité fraîche.
Aussi, ne manquez surtout pas de créer de belles rencontres à l’heure du fromage, car le sauvignon adore certaines unions fromagères.
Optez pour un plateau composé de fromages de chèvre encore crémeux, comme un assez jeune pouligny-saint-pierre, un sainte-maure (mi-sec) ou un savoureux serra da estral Casa Matias (Portugal). La fraîcheur et le corps assez plein des vins néo-zélandais n’en feront qu’une bouchée!
François Chartier « Créateur d’harmonies »
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