LA BIODIVERSITE : LE CHAINON MANQUANT DU CONCEPT GLOBAL DE TERROIR

L’IMPACT DE LA BIODIVERSITE BOTANIQUE SUR L’IDENTITE AROMATIQUE DES VINS ET DE LA GASTRONOMIE

Extrait du Manifeste du même nom, publié le 4 avril 2022, signé par l’équipe du Chartier World LAB Barcelona.

 

Avec la divulgation de ce manifeste, qui est en fait la première phase (sur cinq) d’analyse des harmonies moléculaires adaptée à l’étude de l’impact de la biodiversité botanique sur l’identité aromatique des vins, pour la première fois dans l’histoire du vin, le fondateur de la science aromatique des harmonies moléculaires, François Chartier, auteur du livre Papilles et Molécules, appuyé par sa partenaire, la sommelière Isabelle Moren, et par l’équipe scientifique et multidisciplinaire du Chartier World LAB Barcelona, dont Nicolas Roché, dévoile le chaînon manquant du concept global de terroir viticole – ainsi que du terroir gastronomique. Cette étude exhaustive est la première dont l’ambition est de démontrer scientifiquement l’impact aromatique de la biodiversité botanique sur l’identité aromatique des vins,  ainsi que sur les aliments. 

Le but premier est de définir « le sens du lieu » en complétant le concept global de « terroir » dans l’univers des vins et de créer de nouveaux outils, via la connaissance des impacts de la biodiversité, afin de permettre à cette dernière, tout comme aux viticulteurs, de s’adapter à la transition écologique enclenchée par les changements climatiques que nous vivons actuellement. Le sens du lieu dans l’univers des vins s’applique également à l’univers de la gastronomie, influencée elle aussi par le paysage d’une biodiversité locale singulière.

Que cela veut-il dire plus concrètement ?

Prenons l’exemple sur mesure qu’est la garrigue du Midi. Dans le domaine du vin, le terme « garrigue » est utilisé pour évoquer des arômes camphrés, herbacés, poivrés et résineux, ou encore de fumé, évoquant la végétation basse (le maquis) qui pousse à l’état sauvage sur les sols brûlés par le soleil des rives de la Méditerranée, en particulier dans le sud de la France, mais aussi sur le pourtour du bassin méditerranéen (Espagne, Italie, Grèce, Liban, etc.), ainsi que dans d’autres régions viticoles du monde où le climat est de type méditerranéen. 

Les vins du Roussillon, du Languedoc, du Rhône méridional et de la Provence sont couramment dominés par les arômes de cette biodiversité méridionale aux notes de garrigue (thym, romarin, origan, sarriette, serpolet, lavande). De Fitou à Bandol, en passant par Pic Saint-Loup et Châteauneuf-du-Pape, l’odeur pénétrante du maquis (garrigue) signe le plus souvent l’identité aromatique de ces crus. 

C’est d’ailleurs le cas dans de nombreuses autres zones viticoles européennes, à l’instar du Priorat, du Montsant et du projet de vignoble de Sabater (la Vinya d’en Sabater), à Santa Coloma de Gramenet, dans la province de Barcelone, en Catalogne.

Est-ce dû au hasard ? Non. Il s’agit en fait d’un phénomène d’aérocontamination classique dans l’univers des vins, comme c’est le cas pour l’élevage des vins en barriques de chêne, par exemple, et de multiples autres cas d’aérocontamination décrits dans la première phase de l’étude documentée qui fait l’objet de ce premier ouvrage.

Ce phénomène démontre très bien que la vigne, via les raisins et les feuilles, et même les rafles, emmagasine les molécules aromatiques contenues, entre autres, dans l’air (comme c’est le cas ici avec les molécules odorantes des huiles essentielles des différentes herbes et plantes de la garrigue), pour les restituer dans le marc (jus de raisins), puis dans le vin après fermentation.

Lorsqu’un sommelier vous dit que « déguster un vin, c’est boire un paysage », c’est exactement ce à quoi il fait référence : l’expression d’un écosystème complexe, liant à la fois la vigne, le sol, le climat et les pratiques humaines ancestrales, ainsi que la biodiversité d’un lieu-dit, ce qui inclut toutes formes de vies animale, végétale et bactérienne (dont les microorganismes qui vivent dans le sol et sur la vigne).

La garrigue, qui est riche d’une biodiversité unique, est donc le milieu idéal pour démontrer l’impact incontestable qu’a la biodiversité sur les arômes des vins, ce que nous avons nommé au Chartier World LAB Barcelona « le chaînon manquant du concept global de terroir ». Donc de la notion selon laquelle les arômes et les saveurs du vin sont directement influencés par l’écosystème dans lequel la vigne est cultivée et le vin est élaboré.

 

DÉTAILS DES PHASES D’ANALYSE DE L’IMPACT DE LA BIODIVERSITÉ BOTANIQUE SUR L’IDENTITÉ AROMATIQUE DES VINS

phase 1 : conceptualisation

Cette phase porte sur la preuve détaillée, par l’équipe multidisciplinaire et scientifique du Chartier World LAB Barcelona, avec la collaboration de la chaire « Universitat de Barcelona – Gastronomía y Aromas – Chartier World LAB Barcelona », de l’impact de la biodiversité botanique sur l’identité aromatique des vins, en détaillant et résumant plusieurs exemples et études existantes, et en livrant un premier aperçu de la biodiversité de Santa Coloma de Gramenet (province de Barcelone), plus particulièrement du projet du vignoble de la Vinya d’en Sabater, le vignoble expérimental du Campus de l’Alimentació de l’université de Barcelone.

Ce manifeste, dont les travaux ont débuté en 2019, démontre de manière incontestable que l’analyse de l’impact de la biodiversité botanique sur l’identité aromatique des vins est nécessaire pour mieux comprendre la place de la biodiversité dans l’identité des vins, donc dans le « sens du lieu » de ces derniers.

Publication du manifeste : 4 avril 2022, Barcelone.

phase 2 : recherche et analyses

Analyses moléculaires de la biodiversité de différents vignobles du monde, dont celui de la Vinya d’en Sabater, le vignoble expérimental du Campus de l’Alimentació de l’université de Barcelone.

Détail de l’analyse de la biodiversité d’un vignoble et de son environnement : 

Les éléments traces, principalement sous forme particulaire dans l’air ambiant, sont à des teneurs extrêmement faibles, ce qui nécessite le développement de techniques de collecte et d’analyse particulièrement sensibles.

Pour y parvenir, le piégeage des molécules volatiles contenues dans un grand volume d’air, prélevé dans l’environnement immédiat de la biodiversité immédiate d’un vignoble donné, est privilégié.

Celles-ci seront ensuite extraites et analysées par une chromatographie en phase gazeuse couplée à de la spectrométrie de masse.

Cette analyse permet de mettre en évidence les molécules minoritaires pouvant être liées à la composition du couvert végétal de la biodiversité, pour ainsi définir quel est l’identité aromatique de la biodiversité d’un lieu donné.

Pour finir, en réalise des analyses de chromatographie en phase gazeuse et olfactométrie sur les vins qui en sont issus afin de tenter de trouver une corrélation entre l’identité aromatique de ces vins et l’identité aromatique de la biodiversité du lieu.

Voici les différentes étapes pour y parvenir :

– Analyse de l’impact aromatique de la biodiversité de chaque saison de trois récoltes d’un vignoble sélectionné:

– Analyse aromatique de l’air dans l’environnement du vignoble.

– Analyse aromatique de la flore de l’environnement du vignoble (herbes sauvages, arbres, fleurs, etc.).

– Analyse d’harmonies moléculaires de la flore autour du vignoble (herbes sauvages, arbres, fleurs, etc.) pour obtenir une liste des ingrédients complémentaires partageant les mêmes molécules aromatiques dominantes que la faune, afin de créer une cuisine qui transcrit le sens du lieu.

– Analyse des arômes du sol (y compris le microbiome et l’humus) de chaque saison.

– Analyse méta-génomique fonctionnelle prédictive du microbiote du sol et du sous-sol (targeted metagenomic & shotgun metagenomic sequencing).

– Analyse aromatique de la pruine du raisin.

– Analyse aromatique des différentes parties de la vigne (feuilles, tiges, rafles).

– Analyse aromatique du moût (avant fermentation).

– Analyse des arômes du vin (après la fermentation, avant l’élevage).

– Analyse des arômes à la fin de l’élevage du vin (avant la mise en bouteille).

– Analyse aromatique du vin (une fois en bouteille).

– Analyse aromatique du vin de trois millésimes, une fois par an, pendant les trois années suivantes chacun des trois millésimes.

Publication des résultats.

Création et dévoilement d’une nouvelle certification:  «Biodiversité Aromatique Chartier World LAB».

phase 3 : conclusion

Démonstration scientifique du lien entre les arômes des vins et la biodiversité de différents vignobles du monde. 

Publication des résultats.

phase 4 : expérimentation

Phase expérimentale d’essais visant à influencer le style aromatique des vins par une biodiversité ciblée dans le but, via une meilleure compréhension de la biodiversité, sur la base des résultats d’analyse des phases 1, 2 et 3, de contribuer à la sauvegarde (ou à la régénération) de la biodiversité bousculée par les intrants chimiques, en particulier après-guerre, ainsi que par les changements climatiques actuels.

Publication des résultats.

phase 5 : harmonies moléculaires de la biodiversité

Une fois ces quatre premières phases effectuées, l’idée est d’utiliser ces données d’analyse moléculaire pour à la fois prouver l’impact de la biodiversité botanique sur l’identité aromatique des vins (tel que décrit en phase trois) et dénicher les autres ingrédients partageant les mêmes molécules dominantes que celles trouvées tant dans les plantes et autres arbustes et fleurs du milieu que dans les vins qui en sont issus. Il s’agit de construire un nouveau vocabulaire de la biodiversité aromatique du végétal et des vins, qui ouvrira la voie à une nouvelle carte aromatique des harmonies mets et vins possibles entre aliments complémentaires de la biodiversité, ce qui à son tour permettra de créer une nouvelle « biodiversité gastronomique » du « sens du lieu » dans l’harmonie entre l’assiette et le verre.

Ces travaux aboutiront sur un second projet de recherche et de publication, sur le chaînon manquant du concept global de terroir gastronomique dans l’univers de la cuisine, avec la publication d’un « Manifeste pour la mise en valeur d’une transition écologique de la biodiversité gastronomique ». La divulgation ultérieure de ce manifeste gastronomique, qui naîtra de l’analyse des harmonies moléculaires adaptée à l’étude de l’impact aromatique de la biodiversité sur la création d’une cuisine locale, permettra aussi de transcrire le paysage du lieu dans l’assiette et ainsi dévoiler « le chaînon manquant du concept de terroir gastronomique dans l’univers de la cuisine ».

Le nez film Chartier

La science

François Chartier a créé une « nouvelle mathématique du goût » en 2002. En combinant des ingrédients dominés par des molécules aromatiques de même famille, le résultat est plus grand que la somme des parties :
1 + 1 = 3 !

Chartier Biographie

Catedra ub

Chaire Universitat de Barcelona « Gastronomía y Aromas », créée le 3 novembre 2021 – la première chaire en gastronomie de l’histoire de cette université fondée en 1450 – et née de la collaboration entre la Chartier World LAB et le Campus de l’Alimentació de Torribera (université de Barcelone).

L'éssentiel de Chartier

science & cooking

Nous sommes fiers d’annoncer que le CHARTIER WORLD LAB est, depuis 2021, la délégation officielle du Science and Cooking World Congress Barcelona à NIHONBASHI-TOKYO (Japon), MONTREAL (Canada) et DOURO (Portugal).